Déclaration de la CFE-CGC
au Conseil supérieur de l’éducation
Séance du 9 juin 2022
M. le président, mesdames et messieurs les membres du CSE,
À quelques semaines de vacances d’été bien méritées, nombre de professeurs des écoles savent que la prochaine rentrée sera explosive.
Deux réformes devraient en effet entrer en vigueur pour l’enseignement du 1er degré :
les évaluations d’écoles et la généralisation de l’école dite « du futur » (sic) dans laquelle une part des financements dépendrait d’un projet d’établissement élaboré par des enseignants recrutés par un directeur devenu leur supérieur hiérarchique.
Deux réformes complémentaires, voulues par le Président de la République, et relevant d’une même logique que l’on pourrait qualifier d’entrepreneuriale ou néo-managériale.
À l’origine de cette révolution, des intentions en apparence louables : l’amélioration de la qualité des apprentissages et du bien-être des élèves, des enseignants. Qui pourrait être contre de tels objectifs? En revanche, sans grande surprise, sur les façons d’y parvenir l’opposition est totale. Une écrasante majorité de professeurs des écoles sont absolument persuadés que l’application de méthodes de management d’entreprise ne favorisera en aucune façon l’instruction des élèves ni le climat scolaire.
En premier lieu, quel que soit le diagnostic posé à l’issue d’une « évaluation d’école », on ne pourra que feindre d’apporter des solutions, et pour cause : apporter des solutions nécessite de maîtriser les leviers réels de la réussite scolaire.
Or, les équipes enseignantes, malgré toute leur bonne volonté, ne pourront ni diminuer les effectifs par classe, ni remédier aux carences éducatives graves de certains de leurs élèves, ni encore faire face aux situations ingérables induites par la très mal nommée « école inclusive »…
Donc, faute d’être en capacité de régler quelque problème que ce soit, les équipes auront le choix entre soit porter le fardeau de la responsabilité d’un échec inévitable, soit truquer les résultats, donner le change afin de sauver leur honneur et leurs maigres primes.
Plus caporalisés que jamais, sous la houlette d’un chefaillon de proximité, les professeurs des écoles auront des comptes à rendre dans le cadre de contrats d’objectifs qui s’imposeront à eux au détriment de leur liberté pédagogique. Quel progrès pour le bien-être au travail !
En résumé:
Aucune amélioration à attendre pour les résultats des élèves puisque d’ineptes, creux et prétentieux « projets » se substitueront toujours davantage à une instruction réelle et solide.
Aucune amélioration à attendre pour le bien-être au travail des personnels qui seront encore davantage fatigués, culpabilisés et caporalisés.
Proche nous semble le jour où ces coups de boutoir incessants auront raison de l’extraordinaire conscience professionnelle des professeurs des écoles de ce pays.
À voir l’effondrement des inscriptions aux épreuves du CRPE, ce jour est peut-être d’ailleurs déjà arrivé.
Action & Démocratie CFE-CGC dénonce ces projets catastrophiques regroupés par le Président de la République sous le vocable grotesque d’ « école du futur ».
L’école publique que nous aimons peut bien sûr encore être sauvée, il suffirait pour cela de laisser travailler en paix des enseignants, fonctionnaires d’État aux compétences disciplinaires solides, dignement rémunérés, respectés et soutenus par leur hiérarchie, maîtres de leurs classes dans lesquelles les effectifs auront été limités à 20 élèves.
C’est simple, c’est faisable, c’est efficace. C’est à l’opposé absolu de toutes les politiques éducatives en vigueur depuis 40 ans.